Plongeons dans l’histoire captivante d’El Gour, un site archéologique marocain qui, malgré son importance, demeure étonnamment méconnu. Préparez-vous à être émerveillé par la grandeur de ce mausolée berbère et à déplorer son relatif oubli !
El Gour, situé non loin de Sebaa Aïoun et de la majestueuse Meknès, est un nom qui résonne avec mystère. Ce pluriel de « gara », évoquant des buttes témoins ou des collines isolées aux pentes abruptes, nous transporte immédiatement dans un paysage grandiose, sculpté par le temps et la nature. Imaginez ! Un mausolée, l’un des plus grands monuments funéraires du Maroc après le tertre de Mezora, dressé là, témoin silencieux d’une époque lointaine. Érigé en l’honneur d’un personnage important, dont l’identité exacte demeure un sujet de spéculation, El Gour est une énigme à la fois fascinante et frustrante. L’inscription du site sur la liste indicative de l’UNESCO en 1995 aurait dû sonner comme un signal d’alarme, un appel vibrant à la préservation et à la recherche, mais, hélas, la réalité est tout autre.

Pourquoi un tel désintérêt ? Comment un monument d’une telle envergure peut-il ne pas attiser la curiosité des archéologues, des historiens, des amoureux du patrimoine ? C’est un crève-cœur de constater que si peu de personnes se sont penchées sur El Gour. Heureusement, il y a eu Gabriel Camps, un préhistorien passionné par l’histoire berbère, qui a eu le mérite de reconnaître la valeur inestimable de ce lieu. Dès 1959, il entreprend des études qui permettent de rattacher le monument à la famille des « bazinas », ces monuments funéraires caractéristiques de la période anté-islamique. Camps date El Gour et le classe dans la catégorie des monuments funéraires, offrant ainsi un cadre de compréhension initial, une lumière dans l’obscurité.
Son livre, « Le Gour, mausolée berbère du VIIe siècle », est un témoignage poignant de son engagement. Il s’agit d’un cri d’alarme, d’un appel à l’action pour sauver ce site de l’oubli et de la dégradation. Camps nous apprend que le Marquis de Segonzac, un voyageur épris du Maroc, avait déjà mentionné El Gour en 1903 dans « Voyages au Maroc ». Segonzac, un véritable explorateur, avait parcouru le pays à maintes reprises, laissant derrière lui deux ouvrages témoignant de sa fascination. Il est réconfortant de savoir que même au début du XXe siècle, la beauté et le potentiel historique d’El Gour avaient déjà été perçus.
La description qu’en fait Camps est captivante. Imaginez deux constructions : un mausolée circulaire imposant, de 40 mètres de diamètre, s’élevant à près de cinq mètres de hauteur. De loin, il apparaît comme un cylindre majestueux, constitué de trois assises. Ce qui rendait cette bazina particulièrement « originale » était son « couronnement en gradins », une caractéristique architecturale unique qui témoigne du savoir-faire et de l’ingéniosité des bâtisseurs de l’époque.

Malheureusement, le temps et la main de l’homme ont laissé des cicatrices profondes sur El Gour. Les « déprédations et pillages » ont ravagé le monument, réduisant le dallage à un simple souvenir. L’image de la beauté originelle du mausolée s’est estompée, et le « mobilier funéraire qui devait être important » a été dispersé, ne laissant derrière lui que quelques vestiges : un fragment d’anneau de fer, une pendeloque en bronze en spirale, des tessons de céramique rouge, un fil de cuivre torsadé et une minuscule anse en verre. Ces fragments, aussi modestes soient-ils, sont des reliques précieuses, des fenêtres ouvertes sur le passé, qui nous rappellent ce qui a été perdu et ce qu’il faut impérativement protéger.
La seconde construction, une plate-forme rectangulaire située à 35 mètres au nord-est, ajoute une dimension supplémentaire à l’ensemble. Camps a observé que, du sommet d’El Gour, cette plate-forme marque le levant au solstice d’été. Cela suggère une connaissance astronomique sophistiquée et une possible signification rituelle. Imaginez les cérémonies qui ont pu se dérouler à cet endroit, il y a des siècles, en harmonie avec les cycles du soleil !

Heureusement, El Gour a été classé monument historique par le décret n°2-80-80 du 5 février 1980. Ce décret, en protégeant le site dans un rayon de 50 mètres, interdit toute modification sans l’autorisation du ministère de la Culture. C’est un pas important, mais il est loin d’être suffisant. La protection légale est essentielle, mais elle doit s’accompagner d’une véritable volonté de recherche, de restauration et de valorisation du site.
Il est temps de sortir El Gour de l’ombre ! Il est temps de mobiliser les ressources et les compétences nécessaires pour percer les secrets de ce mausolée berbère, pour comprendre son histoire, pour préserver sa beauté et pour le partager avec le monde. El Gour est un trésor national, un témoin exceptionnel du passé marocain. Ne laissons pas l’indifférence et l’oubli l’anéantir. Faisons en sorte qu’El Gour retrouve la place qu’il mérite dans le patrimoine mondial, et qu’il continue d’inspirer l’émerveillement et la curiosité des générations futures ! L’aventure ne fait que commencer!
Gérard Flamme