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Hommage aux femmes brodeuses d’ici et d’ailleurs

Hommage aux femmes brodeuses d’ici et d’ailleurs

l’Institut du Monde Arabe accueille l’exposition «Tarz. Broder au Maroc, hier et aujourd’hui». Celle- ci propose des collections exceptionnelles de broderies marocaines mettant en lumière des spécificités des villes et régions qui ont participé à l’évolution de cet art.

La broderie marocaine est à l’honneur des deux cotés de la Méditerranée. En effet, vient de se terminer une exposition remarquable sur cet artisanat d’art à Tourcoing (France). De même il y a quelques semaines s’est déroulée à Rabat une exposition également sur la broderie marocaine.

Jusqu’au 16 juillet 2023, l’Institut du Monde Arabe a accueilli l’exposition «Tarz. Broder au Maroc, hier et aujourd’hui». Celle- ci a proposé des collections exceptionnelles de broderies marocaines mettant en lumière des spécificités des villes et régions qui ont participé à l’évolution de cet art.


L’Institut du Monde Arabe (IMA) met à l’honneur la broderie marocaine dans tous ses états à travers l’exposition intitulée «Tarz. Broder au Maroc, hier et aujourd’hui». Celle-ci présente les collections exceptionnelles de broderies marocaines du Musée d’Angoulême provenant pour l’essentiel de l’ancienne collection Prosper Ricard mais aussi des créations contemporaines qui viennent dialoguer avec les œuvres traditionnelles. Elle propose un voyage enchanteur dans cet art délicat et exigeant, raffiné et intime, qui a connu influences et mutations diverses au cours du temps. Elle donne à voir des créations originales imaginées par l’artiste Fatima Lévèque et réalisées à ses côtés par deux ateliers marocains, faisant de cette exposition un dialogue fécond entre collection patrimoniale et création contemporaine. «Dans les pas du guide précieux qu’est Prosper Ricard, à travers les pièces de sa collection conservées au Musée d’Angoulême- parfois de simples fragments- j’ai disséqué, étudié, documenté, appris. Pour chercher, analyser, classer, comparer, je suis allée à la recherche de ses propres sources retrouver des points qu’il n’avait eu le temps d’étudier. Je me suis immergée, mes nuits peuplées des trésors brodés des arts ottomans, arabo-andalous, maroco-berbères, et tant d’autres encore qui ont nourri et enrichi le répertoire et les techniques», indique l’artiste designer Fatima Lévèque dans le catalogue de l’exposition.

Pour en donner à voir la richesse et la diversité, cette artiste explique qu’elle part de fragments pour faire renaître la pièce entière, ainsi le châle de hammam de Meknès, mais aussi créer de nouvelles pièces dans une approche contemporaine pour retrouver la technique d’un point disparu ou le style d’une école. «Cette manière de procéder a permis d’aborder une approche patrimoniale, stylistique et technique avec les brodeuses engagées au Maroc à mes côtés. S’il a hélas pu confirmer la disparition de bien des savoirs, ce projet a permis aux brodeuses d’en retrouver certains, voire de les dépasser, ainsi pour la réalisation du jardin suspendu», ajoute-t-elle.

L’exposition «Tarz, Broder au Maroc, hier et aujourd’hui» propose en effet aux visiteurs une découverte inédite des spécificités des villes et régions qui ont, à travers les âges, participé à l’émergence et l’évolution de la broderie marocaine, en l’occurrence Fès, Rabat, Salé, Azemmour, Chaouen, Tétouan, Meknès, Tafilalt et de l’Anti-Atlas. La broderie est un art universel, essentiellement pratiqué par des femmes, pour rehausser le luxe des vêtements et des intérieurs. Travail de patience et de rigueur, il repose autant sur l’habileté manuelle que sur l’intuition artistique et sur la pensée rationnelle. «Au Maroc, les broderies jouent un rôle majeur dans la culture visuelle. Elles séduisent par leurs nuances subtiles, leurs harmonies rythmées et la force qui se dégage de leurs compositions, spécifiques à chaque ville ou région», conclut l’IMA

AInsi donc également durant le mois de Mai 2023 a eu lieu l’exposition « la Broderie marocaine rencontre les broderies du monde » à Rabat.

Le ministère de la Solidarité, de l’Insertion sociale et de la Famille, en partenariat avec les représentations diplomatiques de plusieurs pays au Maroc, rend hommage aux femmes brodeuses à travers l’exposition « la Broderie marocaine rencontre les broderies du monde ».

Cette exposition, qui a eu lieu à l’Espace Expressions CDG (Rabat) sous le thème « Femmes et broderie : du savoir-faire ancestral à l’autonomisation », a proposé un voyage dans le temps à travers la diversité du savoir-faire d’antan qu’est la broderie à la main, une pratique universelle qui, réalisée exclusivement par des femmes, représente une composante essentielle du patrimoine culturel de chaque pays.

Elle se veut une occasion de rendre hommage aux femmes brodeuses et de mettre en avant la broderie comme source d’autonomisation économique de la femme. Elle leur a offert l’opportunité de promouvoir les différentes pièces de broderie permettant ainsi de mettre en lumière la broderie comme moyen d’expression des femmes depuis des générations, qui reflète leurs identités, leurs valeurs, leurs envies, leurs passions…

Cet événement, initié en coopération avec l’Entraide nationale, l’Agence de développement social, « Dar Maalma » et le Réseau des femmes artisanes du Maroc, est intervenu dans le cadre des efforts menés par le ministère pour renforcer les droits constitutionnels de la femme marocaine et promouvoir leur condition.

La ministre de la Solidarité, de l’Insertion Sociale et de la Famille, Aawatif Hayar, a affirmé que cette manifestation avait pour objectif de jeter des passerelles entre la broderie marocaine et celles des autres pays du monde, ainsi que de mettre en avant les aspects civilisationnel, culturel et décoratif de ce métier artisanal.

Dans ce contexte, elle a expliqué que la broderie a constitué à travers les siècles un mécanisme d’autonomisation économique des femmes, notant que les pièces exposées ont été brodées à la main par des femmes artisanes et représentent une source de revenus pour subvenir à leurs besoins et à ceux de leurs familles.

Réparti sur quatre alcôves décalées, le lieu d’exposition a mis en scène ce savoir-faire ancestral, mêlant les différents Tarzs des 12 régions du Royaume, l’artisanat hébraïque et les différentes broderies provenant des 5 continents.

Pour sa part, la coordonnatrice régionale de l’Entraide nationale de Rabat-Salé-Kénitra, Zineb Ouelhajen, a souligné que l’organisation de cette exposition, qui comprend une sélection de pièces brodées, est une incarnation de la richesse et de la diversité des styles de la broderie marocaine, tels que les styles fassi, meknassi, slaoui, zemmouri et oriental.

L’exposition a donné à voir et à apprécier une collection de pièces brodées à la main issues de plus de 25 pays, reflétant les diverses formes de métissage culturel et la richesse de ce patrimoine historique propre à chaque pays, dans ses dimensions matérielle et immatérielle, que les femmes et les « Maalmates », en particulier, oeuvrent à sa préservation tout en veillant à sa transmission aux générations montantes.

Ces œuvres exposées, qui ont offert au public la possibilité de découvrir les styles, les motifs et les techniques de broderie, et de percevoir ainsi une identité culturelle commune, ont traduit aussi les grands efforts consentis pour la valorisation de ce métier artisanal qui témoigne de la profondeur du patrimoine culturel et civilisationnel commun entre les différentes sociétés.

Les visiteurs ont eu, en outre, rendez-vous avec des ateliers interactifs organisés par l’Entraide Nationale et encadrés par des « Maalmates » formatrices brodeuses relevant de ses différents centres de formation au niveau des 12 régions du Royaume, qui expliqueront le rôle de ces centres dans la préservation de ce savoir-faire ancien et la création d’opportunités pour l’autonomisation économique des femmes marocaines.

Un peu d’histoire. Un art ancestral

La broderie marocaine, appelée « Tarz » est un art ancestral au Maroc et se transmet de génération en génération depuis plusieurs siècles. Si la précision est de rigueur, elle permet d’exprimer sa créativité et de personnaliser de nombreux supports. Elle offre de nombreuses possibilités de motifs que l’on retrouve dans toutes les familles marocaines. Traditionnellement, les draps du trousseau de la mariée ou de naissance des grandes familles étaient personnalisés en broderie fassi. Signe distinctif de raffinement et de luxe, la broderie est toujours restée au goût du jour et a même connu un engouement ces dernières années. Les  types de broderie marocaine majoritairement répandus sont la broderie fassi, la broderie rbati et la broderie de Tétouan.

La broderie marocaine de FÈS

La broderie marocaine fassi, surnommée Tarz el fassi (broderie de Fès) ou Tarz el ghorza (broderie au point),  est d’inspiration traditionnelle. Elle utilise un système de trame géométrique, technique utilisée depuis des siècles, mais reste cependant intemporelle de par ses dessins. Il n’y a pas d’esquisse de dessin préalable à faire, la broderie s’exécutant directement à points comptés. Le rendu parfait des dessins s’obtient avec l’expérience et la maîtrise de cet art permettant un recto/ verso strictement identiques. Cette technique est habituellement monochrome au fil rouge vif, grenat, bleu ou noir.

La broderie de RABAT

La broderie marocaine rbati (broderie de Rabat) est différente et a évolué au cours des dernières années permettant de distinguer la broderie dite du Vieux Rabat et celle moderne. La plus ancienne est représentée par plusieurs compositions avec notamment des silhouettes humaines, largement utilisées à partir du XVIIIème siècle et quelque peu abandonnées vers la fin du XIXème siècle. La monochromie est massive avec des couleurs jaune vieil or, rouge foncé ou bleu sombre. D’autres compositions représentent des crosses et spirales qui décorent, dans l’histoire, les angles de chapiteaux. Le style a une monochromie plus aérée avec 2 ou 3 tons maximum. Enfin, on retrouve les compositions réalisées sur la base de motifs végétaux abondants avec une riche polychromie. Ce type de broderie ancestrale de Rabat a su évoluer vers un style de broderie plus moderne. Prennent alors le dessus les décors végétaux qui ne seront plus appliqués seulement aux ornements décoratifs mais aussi vestimentaires avec une polychromie reproduisant de façon très architecturée les éléments.

La broderie de TÉTOUAN

La broderie marocaine de Tétouan est également très répandue et a un style unique. On la surnomme Tarz Titouani ou Taajira et la technique se réalise par la brodeuse avec un coussin rembourré déposé sur les genoux en maintenant la partie à broder enroulée et enveloppée avec une batiste de coton afin de mieux la préserver. Elles utilisent majoritairement des fils en soie naturelle et le jeu de polychromie est très poussé avec des tons forts pour le remplissage des masses et des tons doux pour l’exécution des contours et des éléments secondaires. C’est avec l’influence des expatriés andalous musulmans et juifs que cette broderie a été orientée vers un style balkanique avec une forte identité orientale. Vers 1830, lorsque certains Algériens ont dû quitter leur pays du temps de la colonisation française, les broderies se sont de nouveau enrichies avec de nouveaux éléments artistiques et artisanaux d’origine ottomane.

Et pour finir parlons de cette initiative à Salé (Maroc)

« L’école de Broderie de Salé est une association à but non lucratif fondée par l’artiste styliste marocaine, Fadila El Gadi. La mission de l’école, depuis son ouverture en septembre 2016, est la formation des jeunes issus de milieux défavorisés aux métiers liés aux arts de la broderie. Salé est parmi les villes marocaines les plus connues pour son artisanat. On y travaille toujours la somptueuse broderie dite «Slaouie» au point de croix, serré, couvrant de très grandes surfaces.

Si un grand nombre de femmes et d’hommes possèdent ce savoir-faire, ils réalisent aujourd’hui majoritairement une production industrielle pour répondre aux besoins d’un marché croissant. De ce fait, ces savoir-faire sont de moins en moins transmis aux jeunes générations et c’est tout un pan de l’art de la broderie marocaine est en voie de disparition.

Parallèlement à cela, la population de la ville de Salé, majoritairement jeune, vit dans une situation de précarité, confrontée à un taux d’abandon scolaire et un taux de chômage importants.

L’école de broderie de Salé contribue, ainsi, à la conservation et à la valorisation du patrimoine culturel marocain et à l’amélioration des conditions sociales des jeunes par le biais de la formation et de l’insertion socio-professionnelle en leur facilitant l’accès au marché de l’emploi.« 

Informations pratiques

Ecole de broderie de Salé – Ecole entièrement gratuite – https://ecoledebroderie.ma/ – Pour soutenir : https://www.lepotcommun.fr/pot/9c6316yx

Gérard Flamme

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