« Play it again, Sam ». Nous avons fait le voyage à Casablanca pour vivre « l’expérience » du Rick’s Café, une réplique du mythique night-club du classique hollywoodien « Casablanca » sorti en pleine Seconde Guerre mondiale il y a 80 ans.
Dans ce film culte, le Rick’s Café est le théâtre de la romantique histoire d’amour entre Rick Blaine et Ilsa Lund – incarnés par Humphrey Bogart et Ingrid Bergman –qui se rencontrent à Casablanca, sous le régime de Vichy, pro nazi (France) en 1941.
Pourtant, aucune scène du mélodrame de Michael Curtiz (1942) n’a été tournée au Maroc, puisque entièrement réalisé dans les studios Warner Bros en Californie (USA). Ce film est une légende et le café dans lequel se situent certaines actions a été reconstitué à Casablanca par une ex-diplomate américaine, Kathy Kriger (décédée en 2018).
« Je tenais absolument à venir ici, même en sachant que le film n’y a pas été tourné. L’ambiance est fascinante », nous confie Wendy, une américaine de New-york. « Ce lieu est une expérience unique, nostalgique et romantique, il faut la vivre une fois dans sa vie », s’enthousiasme cette cinéphile.
« Dans mon imaginaire, la ville de Casablanca est associée au Rick’s Café », ajoute Alexandra cette espagnole rencontrée sur le lieu.
« L’esprit de Casablanca » –
Passer le seuil de cet établissement « classe » appuyé à un rempart de l’ancienne médina de Casablanca, c’est être projeté dans un autre temps. Le restaurant est installé dans un beau riad, sur deux étages, structuré autour d’arcades en stuc, aux poutres sobrement sculptées, dans la pure tradition architecturale marocaine.
Rappelons le scénario du film
« C’est un film intemporel qui restera à jamais ancré dans la légende », résume Najib Salim, le batteur américain qui collabore avec le « live band » du Rick’s Café (casablanca) depuis 15 ans.
Le mélodrame romantique classique et très apprécié de « Casablanca » (1942), est une histoire magistrale de deux hommes se disputant l’amour de la même femme dans un triangle amoureux. Cette histoire de l’espionnage politique et romantique se déroule dans le contexte du conflit de guerre entre la démocratie et le totalitarisme.
Avec une atmosphère riche et enfumée, une propagande anti-nazie, la superbe partition musicale de Max Steiner, du suspense, des personnages inoubliables et des lignes de dialogue mémorables (par exemple, « Voilà, gamin », et le « Play it again, Sam », c’est l’un des films les plus populaires et les plus magiques – axé sur les thèmes de l’amour perdu, de l’honneur et du devoir, du sacrifice de soi et de la romance dans un monde chaotique.
Le scénario a été écrit au jour le jour, c’est dire le talent de Michael Curtiz, réalisateur à l’accent hongrois. Le rôle masculin principal est allé à Humphrey Bogart dans son premier rôle romantique en tant que propriétaire de café dur et cynique à l’extérieur, aux principes moraux et sentimental à l’intérieur à Casablanca (Maroc). Son apparition avec la co-star Ingrid Bergman était leur première – et dernière. En tant qu’expatrié américain endurci, Bogart dirige un bar/casino (Rick’s Cafe Americain) – une étape vers la liberté dans le Maroc occupé par les Français pendant la Seconde Guerre mondiale. Elle est mariée à un héroïque chef de la Résistance française. Obstinément isolationniste, le héros est inspiré pour soutenir le mouvement de la Résistance et renoncer au bonheur personnel avec son amour passé.
Le conte de fées hollywoodien a en fait été filmé à une époque de liens entre les États-Unis et la France de Vichy, lorsque le président Roosevelt a hésité longuement entre un soutien pro-Vichy (collaborationniste avec les nazis) ou pro-gaulliste (représentant la France libre). Et il a été précipité dans la libération générale près de trois semaines après le débarquement allié dans la ville nord-africaine occupée par l’Axe de Casablanca, lorsque les forces d’Eisenhower ont marché dans la ville africaine.
Rappelons que la Conférence de Casablanca s’est déroulée du 14 au 24 janvier 1943 (une réunion au sommet à lequel Roosevelt a rompu les relations américano-vichy) dans la ville marocaine avec Churchill, Roosevelt et deux dirigeants français – De Gaulle (le leader charismatique de la France libre) et le général Henri Giraud (soutien du maréchal Pétain). Staline (URSS) a décliné l’invitation à assister à la conférence dite des « Trois Grands ». Roosevelt logera à la villa Roosevelt (Casablanca), un joyau de l’architecture encore trop méconnue.
Le film à gros budget pour l’époque a été considéré pour huit Oscars pour l’année 1943.
Les nominations comprenaient le meilleur acteur (Humphrey Bogart), le meilleur acteur dans un second rôle (Claude Rains), la meilleure photographie N/B (Arthur Edeson, connu pour The Maltese Falcon (1941)), la meilleure musique (Max Steiner, connu pour Autant en emporte le vent ( 1939), et meilleur montage de film (Owen Marks). Le film a remporté trois prix (présentés début mars 1944) : meilleur film (producteur Hal B. Wallis), meilleur réalisateur et meilleur scénario.
A Casablanca « Le Rick’s n’est pas une réplique exacte du café du film. Mais peu importe. La seule chose qui a été parfaitement reproduite finalement c’est son esprit ». Les lumières tamisées des photophores en fer forgé, les abat-jours perlés, le répertoire jazz et blues des années 30 et 40, les affiches vintages du film. Jusqu’au piano sur lequel est jouée le soir la chanson « As Time Goes By », interprétée dans le film par « Sam » (le musicien Dooley Wilson), qui accompagne la romance de Rick et Ilsa.
« Il ne manque plus que la roulette de casino et l’ambiance enfumée et dramatique de l’époque ».
« Intemporel » –
« Casablanca », œuvre de propagande revendiquée, sera projeté en avant-première le 26 novembre 1942, juste après le début de l’Opération Torch (débarquement des Alliés le 8 novembre 1942 dans les territoires français d’Afrique du Nord (Maroc et Algérie)).
Le film bénéficiera d’un deuxième coup de projecteur à sa sortie nationale en janvier 1943 avec la participation du président américain Franklin D. Roosevelt à la Conférence de Casablanca, une réunion de préparation des opérations alliées contre la coalition de l’Axe.
« Le film est ainsi devenu une part de l’expérience américaine de la guerre et de sa fabrique culturelle », souligne l’historienne. Aujourd’hui encore, la popularité du film dans l’imaginaire collectif ne faiblit pas.
Pour l’anecdote, la table 26
En octobre 2012, le serveur de la table 26 au premier étage apporta l’addition aux deux couples qui avaient un long déjeuner lent. Ils ne semblaient pas pressés de payer non plus et il se demandait « qu’est-ce qui leur prend si longtemps ? ». Plus tard, alors qu’ils partaient, ils l’ont remercié pour sa patience car les heures normales de fermeture étaient passées. Ils ont expliqué qu’ils aimaient tellement l’endroit qu’ils pourraient y rester pour toujours. Ils prirent d’autres photos en bas et partirent en laissant le serveur se demander ce qu’ils aimaient tant à cette table.
Place du jardin public, 248 Bd Sour Jdid, Casablanca,
Tel: 05222 – 74207 http://www.rickscafe.ma/
Gérard Flamme
